Festival Ciné Comédies à Lille : “Il faut vraiment redonner le pouvoir aux auteurs”

ARTNEWSPRESS: Plus que passer des films, ce festival veut faire sortir les scénaristes de l’ombre, explique son fondateur, Jérémie Imbert.

Le festival Ciné Comédies de Lille a attiré quelque 12 000 spectateurs l’an dernier et espère faire aussi bien lors de sa seconde édition qui se tient jusqu’à dimanche 6 octobre à Lille. Au programme la projection de classiques mais aussi en clôture et “en exclusivité” le dernier film de Tristan Séguéla, “Docteur ?” qui sortira en décembre sur les écrans avec Michel Blanc en tête d’affiche, révèle le fondateur du festival samedi 5 octobre sur franceinfo, Jérémie Imbert.

Pour lui, ce festival ce n’est pas que pour “passer des films” mais surtout pour pousser les auteurs, ces “gens de l’ombre”, dans la lumière. C’est sa “mission” : “redonner le pouvoir aux auteurs” pour faire de meilleurs films, pour que les films durent et qu’on puisse les revoir dans 15-20 ans”.

franceinfo : Le programme c’est “La grande vadrouille”, “La folie des grandeurs”, soirée Michel Blanc… Ça fait beaucoup de classiques. Ça veut dire que l’esprit de l’humour français est dans ces temps passés ?

Jérémie Imbert : Non, on a aussi des projections de films récents. Mais on aime également mettre à l’honneur des grands classiques de la comédie que les gens n’ont, souvent, jamais vus sur grand écran. Cette expérience collective qu’on souhaite faire vivre au public, c’est de faire vivre le rire ensemble dans une salle de cinéma et pas simplement devant son smartphone, sur un tout petit écran qui ne redonne pas les dimensions de l’art de Gérard Oury par exemple et de tous les artistes qui ont fait des classiques. C’est quand même mieux de les voir en salles et de rire ensemble. Les gens viennent en famille et ça, c’est très important de transmettre aux nouvelles générations des classiques de la comédie et puis des nouveautés.

L’idée c’est de donner ses lettres de noblesses à un genre qui est encore sous-estimé en France ?

Oui, la comédie est un genre sous-estimé. C’est le seul genre qui n’arrive pas à être considéré dans les festivals. On a créé ce festival pour ça, parce qu’on veut donner ses lettres de noblesse à la comédie, qu’elle soit française ou internationale. Pour l’instant, ça prend bien. Les artistes commencent à nous découvrir. La première édition avait été un très gros succès avec notre parrain Pierre Richard. Hier soir, on a eu Bertrand Blier avec une standing ovation, c’était magnifique. François Damiens également est venu. Et puis, ce week-end, Michel Blanc qui terminera dimanche en clôture avec le nouveau film de Tristan Séguéla dans lequel il a le premier rôle aux côtés d’un jeune comédien très intéressant qui s’appelle Hakim Jemili et que les très jeunes connaissent puisqu’il a plus de 500 000 followers sur les réseaux sociaux. C’est un film très chouette, “Docteur ?”, qui sortira en décembre et qu’on va projeter en exclusivité à Lille.

Au-delà de Ciné-comédies, est-ce que les festivals français ont du mal globalement à laisser une place à la comédie ?  

C’est Thierry Frémaux, le délégué artistique du festival de Cannes qui disait en 2013 qu’il avait du mal à imposer la comédie à Cannes. Je sais qu’il tient beaucoup à la comédie puisque dans son festival Lumière à Lyon, il intègre beaucoup de comédies et il n’y a pas de frontières dans les genres. Je trouve que c’est tout à son honneur mais malheureusement c’est vrai que de la part des grands festivals de cinéma, il y a encore un dédain de la comédie parce que les gens se disent : ‘ca va être ringard ou ça va être vulgaire, pouet-pouêt…’ Bref tous les termes qu’on pourrait employer. Mais ce n’est pas toujours le cas. Il y a quelques bijoux mais les auteurs n’étant pas mis en avant et n’étant pas considérés et respectés comme par exemple aux États-Unis où les scénaristes sont les patrons… En France, c’est plutôt les réalisateurs ou les acteurs stars donc peut être que les scénarios, il faudrait les améliorer en se disant : ‘faisons de meilleurs films, pour que les films durent et qu’on puisse les revoir dans 15-20 ans et ne faisons pas juste des films pour attirer un public sur le moment et qui ensuite seront oubliés au bout de trois mois'”.

Les comédies françaises aujourd’hui sont de moindre qualité que dans les années 1980 et précédentes ?

Ce n’est pas qu’elles sont de moindre qualité. Les qualités techniques sont là et peut-être même encore plus fortes mais disons que les scénarios sont un petit peu laissés à l’abandon. Il faut vraiment redonner le pouvoir aux auteurs, aux scénaristes et aux dialoguistes. On a de formidables écrivains en France et nous, à Ciné Comédies, on essaie de leur redonner ce pouvoir en les invitant puisque ce sont des gens de l’ombre. On ne met jamais en avant les scénaristes et nous, on a décidé de le faire. Donc il y a des légendes comme Bertrand Blier et Danièle Thompson et puis de jeunes scénaristes comme Fadette Drouard qui a écrit “Patients” notamment et qui a été la coach de notre première résidence d’écriture. On espère ainsi dans quelques années avoir contribué à ce que les scénarios s’améliorent en France. C’est un petit peu notre mission aussi. On n’est pas là juste pour passer des films mais pour essayer d’apporter notre pierre à l’édifice. Quand on demande aux personnes de citer des répliques du cinéma français, souvent, à 99% ce sont des répliques de comédies. “Les Tontons flingueurs”, “Les Bronzés”, “La grande vadrouille”, “Le grand blond” et je pourrais en citer des dizaines et des dizaines. [S’il ne fallait en citer qu’une :] “Les cons ça osent tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît”, la réplique d’Audiard dans “Les Tontons Flingueurs” dite par Lino Ventura. En plus, Lino Ventura est à l’honneur puisqu’on fête son centenaire et son fils, Laurent Ventura est avec nous et il nous présentera le film “Ne nous fâchons pas” avec son père.

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franceinfo

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