Martin Eden de Pietro Marcello – la critique

ARTNEWSPRESS: Le réalisateur italien Pietro Marcello adapte l’oeuvre de Jack London pour un film unique qui révèle un immense acteur, Luca Marinelli.

Réalisé par :

Pietro Marcello

Avec :

Luca Marinelli, Jessica Cressy, Carlo Cecchi

Date de sortie :

16 octobre 2019

Le synopsis

À Naples, au cours du 20ème siècle, le parcours initiatique de Martin Eden, un jeune marin prolétaire, individualiste dans une époque traversée par la montée des grands mouvements politiques. Alors qu’il conquiert l’amour et le monde d’une jeune et belle bourgeoise grâce à la philosophie, la littérature et la culture, il est rongé par le sentiment d’avoir trahi ses origines.

La bande-annonce

La critique

Du romancier américain Jack London, de nombreux lecteurs connaissent principalement les romans d’aventure comme «Croc-blanc» ou «L’Appel de la forêt», moins les oeuvres semi-autobiographiques, comme justement «Martin Eden», conte philosophique et politique dont la lecture à l’adolescence rend ivre de mots et d’idéalisme littéraire. Le livre raconte l’ascension fulgurante d’un jeune écrivain de Oakland, des bas-fonds à la haute bourgeoisie. Les thèmes abordés sont d’une troublante actualité : la culture est plus que jamais l’objet du commerce, l’art contemporain l’expression du capitalisme le plus débridé où les riches s’achètent une bonne conscience intellectuelle et culturelle et crament la liberté des jeunes artistes en leur promettant une vie de stars. Pour s’intégrer à la classe dominante, la culture et la langue (et encore moins l’amour) ne suffisent pas, il faut démontrer sa «rentabilité» et alors, qu’importent les écrits, ils ne changeront jamais la nature profonde de la société bourgeoise.

La beauté du geste cinématographique de Pietro Marcello est d’avoir transposé l’intrigue en Italie, d’avoir transformé le récit initiatique américain en conte napolitain, tout en conservant la rage du roman et en démontrant une ambition formelle et narrative assez démente. Images d’archive, flash-back, violentes ellipses… le spectateur doit non seulement suivre les pas d’un héros toujours en mouvement mais aussi épouser le fil d’une pensée en perpétuelle ébullition. Déjà dans son précédent film, l’expérimental «Bella et perduta», le cinéaste de Caserte jouait avec les genres et les époques, s’extrayait du naturalisme pour toucher à l’universel tout en restant profondément rattaché à l’héritage culturel italien. C’est toute la force de «Martin Eden» : être à la fois hors du temps, ultra-référencé – on songe souvent aux films des années 60 de Luchino Visconti («Le Guépard») et Bernardo Bertolucci («1900») – et d’une modernité folle. L’acteur italien Luca Marinelli, récompensé au Festival de Venise, incarne avec fièvre le jeune écrivain. Et curieusement fait renaitre un souvenir cinéphile, la vision de Guillaume Depardieu dans «Pola X» de Léos Carax, déjà une histoire d’écrivain maudit…

https://parismatch.com

Yannick Vely

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