Sorry we missed you : précis, tranchant et épuré [Critique]

ARTNEWSPRESS: Une famille broyée par les impératifs de la nouvelle économie qui imposent toujours plus de vitesse.

Quand le temps, qui détruit tout mais permet parfois d’adoucir certaines humeurs, aura fait son œuvre, on reverra les films de Ken Loach et on sera surpris d’y retrouver intactes les traces brutales du présent. On appelle ça être synchrone. Peu le sont. Ken l’est. Ken l’éternel conquérant avait annoncé sa retraite. Et puis non. Un vrai humaniste, ça ne s’arrête pas en si bon chemin (cinquante ans de carrière, deux Palmes d’or). L’objectif de sa caméra en alerte continue de scruter les inégalités, elle déterre les salauds, met les héros du quotidien sur un piédestal. Un inlassable credo qui ne lasse que les paresseux et les cyniques. À l’heure où Jeff Bezos et son programme Amazon Prime permettent à un colis d’arriver chez le client illico, il fallait bien un Loach pour révéler les visages de celui ou celle que l’on ne regarde pas vraiment, tout accaparé à signer le bon de livraison. Ricky (Kris Hitchen) habite Newcastle, avec femme et enfants. Il galère et décide de s’endetter et de s’offrir une camionnette pour devenir chauffeur livreur. Il le devient mais c’est un engrenage quasi mafieux fait de chantage, de don de soi et de vitesse. En bon naturaliste, Loach part comme toujours du réel qu’il habille de cinéma pour raconter la misère sociale. Pas trop d’ornements non plus, sa mise en scène précise, tranchante, épurée, va à l’essentiel, ne s’excuse jamais d’être comme elle est. Tant que Loach sera là, les « sans-grades » resteront des héros de cinéma, donc des héros tout courts. Poing levé et cœur bien accroché !

https://Premiere.fr

Thomas Baurez

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