Séjour dans les monts Fuchun : Un ravissement [Critique]

ROOZBEH JAFARI ARTNEWSPRESS: Premier volet impressionnant d’une saga familiale dans la Chine contemporaine réalisé par un jeune cinéaste de 31 ans.

Gu Xiaogang, réalisateur chinois de l’impressionnant Séjour dans les monts Fuchun, a 31 ans et est déjà au pied d’un Everest dont il a déjà largement dépassé le camp de base. Son film, empruntant son titre à une peinture ancestrale du XIVe siècle, est une chronique familiale contemporaine qui voit une fratrie se croiser et se décroiser sur quatre saisons. Il est présenté par son auteur comme le premier volet d’une trilogie. Péché d’orgueil de jeune cinéaste à l’ego envahissant ? À l’issue des 2 h 20 de ce film, on a envie de se projeter un peu plus loin. Avec ce long métrage, Xiaogang marche rien de moins que sur les traces d’Edward Yang, Hou Hsiao-Hsien ou Jia Zhangke. Tout débute dans un petit restaurant. On y fête l’anniversaire d’une matriarche. Autour d’elle, ses fils, ses petits-fils, ses belles-filles… La caméra à bonne distance laisse chacun se mouvoir dans son cadre et trouver sa place. Le son dirige notre attention au cœur de ce brouhaha. Les personnages se dessinent. Et puis, la fête est finie. La caméra suit les uns et les autres, s’attarde ici et là. Pendant ce temps, au dehors, le monde est en train de changer. La Chine se transforme. Gu Xiaogang filme la ville historique de Hangzhou située à 200 kilomètres au sud-ouest de Shanghai. On détruit des immeubles pour en construire d’autres. Certains spéculent, d’autres restent en dehors d’un boom économique qui accentue les rapports de force. Au milieu de ces principes d’incertitude, il reste la famille. Encore que. À l’heure où la matriarche donne des signes de faiblesse, il faut bien la prendre en charge. Les plus à l’aise financièrement acceptent le « fardeau ». De là, naissent des rancœurs, des rivalités, d’autant qu’il y a également ses propres enfants à élever et à marier correctement.

TRAJECTOIRE HORIZONTALE
Mais la jeunesse s’échappe aussi. Le monde change et, avec lui, c’est bien connu, les traditions. C’est tout ça que le film décrit et embrasse avec une intelligence et une sensibilité dont l’incroyable mesure révèle toute l’humble mais tangible puissance. Séjour dans les monts Fuchun est un film choral qui n’a pas besoin de forcer pour exister. La caméra à hauteur de l’intime caresse les lieux et les êtres. Témoin ce long plan-séquence qui dessine une magnifique trajectoire horizontale épousant le format de l’oeuvre ancestrale dont le film tire son titre.

Séjour dans les Monts Funchun, en salles le 1er janvier 2020.

https://Premiere.fr

Thomas Baurez

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